Mécréantes

Il fallait porter plainte

July 06, 2020 Léane Alestra Season 1 Episode 3
Mécréantes
Il fallait porter plainte
Show Notes Transcript

Qu'est-ce qui se joue derrière les chiffres des violences sexuelles ? Pourquoi le système est inefficace pour protéger les victimes ? Quelles sont les clefs du changement ?
Dans cet épisode je reçois sur un ton informel @olympereve juriste spécialisée dans les violences faites aux femmes et @endolorix jeune militante féministe.

Merci à @mome_podcast pour l'aide au montage et à la réalisation.

Sur le même sujet :
https://www.youtube.com/watch?v=nsXzNXIeI2o
https://www.youtube.com/watch?v=bYg7nac70kM&list=PLFVzK8A2jIlwJzl1PAOjKa_k5DldLYdY-&index=17
https://www.youtube.com/watch?v=s5ya9BzM-Jk

Hannah : A combien de filles il a dû faire ça ? C’est surtout ça qui m’a motivée à porter plainte, parce que maintenant, on va dire que les agressions physiques, les agressions sexuelles j’ai l’habitude, mais… c’est vraiment l’idée que « je peux protéger des filles en le dénonçant » qui m’a poussée à aller porter plainte. 

Sabrina : Une femme se présente devant les services de police. Bon on est quand même une société patriarcale, ça comporte des choses qui ne sont souvent pas très bonnes, c’est-à-dire qu’on ne va pas croire les femmes, on va penser qu’elles sont hystériques, on va penser qu’elles en font trop, qu’elles exagèrent, tous ces stéréotypes sont partagés par les forces de l’ordre.

Témoignage : Il s’est permis de dire que ce qui m’était arrivé, en fait, c’était normal, que des hommes de 60 ans qui draguaient des filles de 20 ans, bah, ça arrivait tous les jours et que je n’avais rien à avancer. Ça c’était 2h après une agression sexuelle. C’était une deuxième agression dans l’agression en fait. C’est comme s’il ne m’avait pas prise en compte parce que je n’étais pas en pleurs à me rouler par terre quoi. 

Sabrina : Comment faire au juste ? Moi il faut que je comprenne la cohérence de chaque gouvernement. Alors ils sont là à créer des numéros de téléphone, mais vous vous foutez de la gueule de qui en fait ? Ça sert à quoi un numéro de téléphone ? Un numéro de téléphone où après 22h on ne peut pas appeler ? C’est hyper hypocrite tout ça.


Léane : Bonjour les mécréantes et les mécréants, aujourd’hui on se retrouve pour parler système et inefficacité de celui-ci en matière de protection contre les violences faites aux femmes. On va parler droit, devoir, et comment changer et renverser l’impunité qui prévaut encore aujourd’hui en France. Comment aller vers un monde de justice et d’égalité sans renier pour autant nos lois protectrices. C’est ce qu’on va voir ensemble avec notamment Sabrina, alias Olympereve sur Instagram, qui est juriste spécialisée dans les violences faites aux femmes. Je vous invite à écouter l’épisode 2 avant d’entamer celui-ci. Par ailleurs, cet épisode aborde des thématiques telles que le viol et les agressions sexuelles, je vous invite donc à l’écouter seulement si ces sujets ne sont pas des sources d’angoisse chez vous. Bienvenu.e dans Mécréantes, et bonne écoute. 

[Intro :Never ever accept « because you are a woman » as a reason for doing or not doing anything.C’est qui cette nana ? Toi de toute façon tu n’es qu’une femme ; tais-toi, tu ne sais pas. Récemment j’ai posté une vidéo de moi par exemple, sur Youtube, de moi sur scène, et dessous il y a un monsieur que je connaissais pas qui a commenté « nulle à chier mais je la baise sans soucis ». On vit vraiment une époque magnifique. Diable non mécréant !]

Léane : Hello Olympe, écoute je suis trop contente de t’avoir ici, est-ce que tu peux te présenter en quelques mots s’il te plaît, un peu, pour celleux qui ne te connaissent pas encore ?

Sabrina : Salut Mécréantes, alors j’ai un parcours un peu particulier, parce que je n’avais que le bac. J’ai travaillé pendant 10 ans et au bout de 10 ans je me suis dit, « tiens, il serait peut-être temps que j’étudie quelque chose », et quand tu n’as que le bac et que tu es précaire, tu subis de plein fouet énormément d’injustices. Ce sont ces injustices qui m’ont conduite vers la fac de droit parce que j’avais besoin de comprendre que ce n’était pas dans ma tête, que c’était la réalité, que quand tu es une femme précaire, tu vis des choses qui sont en fait illégales. Effectivement, j’ai appris plein de choses qui étaient illégales et que j’avais vécues pendant 10 ans, notamment sur mon lieu de travail, dans les relations professionnelles. J’ai mis un point d’honneur à vraiment bien réussir mes études, et ça a été le cas, donc voilà, 5 ans plus tard me voilà ! Léane : Et en plus ce que tu ne dis pas, c’est que tu étais une élève relativement brillante, qui a majoré, mention bien, donc pas mal, tu peux être fière ! D’ailleurs, si tu veux nous dire un peu en quoi ça fait de toi une élève particulière, le fait d’avoir connu 10 ans de précarité avant de rentrer en fac de droit, parce que je trouve ça plutôt intéressant comme analyse ?

Sabrina : En fait j’ai une expérience de la vie, une expérience du monde du travail, qui n’est pas simple. Je pense qu’un.e étudiant.e en fac de droit iel est plutôt préservé.e, iels sont plutôt rares les étudiant.e.s qui viennent de milieux défavorisés, il ne faut pas se leurrer. Moi je suis à la fac à Aix-en-Provence, je ne vois pas beaucoup de pauvres dans les couloirs de la fac, c’est une évidence : les nanas se baladent avec des sacs Balenciaga, les mecs avec des chaussures à 300 boules, ça démontre quand même un certain privilège de classe, c’est évident. Moi je n’ai pas ça mais j’ai la chance d’avoir Pôle Emploi qui m’a soutenue, grâce à ça j’ai pu reprendre mes études, j’ai pu les conduire à bout, parce que sinon ça demande énormément d’argent d’étudier le droit. Il faut du temps, tu ne peux pas travailler en même temps, moi j’ai travaillé un petit peu en même temps mais c’était extrêmement difficile. Je pense qu’il y a une naïveté de la part des étudiant.e.s en droit classiques, celleux qui ont donc la vingtaine (10 ans de moins que moi) sur la vie en général. Je pense qu’iels ne savent pas ce que c’est la vie, et c’est un peu dommage, parce que ce sont des gens qui vont devenir avocat.e.s, qui vont devenir juges, et qui vont appliquer des décisions quand même d’humain.e en ayant très peu conscience de ce qu’est la vie, en tout cas la vie de précaire, alors même que ce sont les populations précaires qui sont de plein fouet touchées par les décisions de justice les plus sévères. Léane : Bon là on va faire abstraction de tous les facteurs psychologiques qui font que les victimes ne portent pas plainte parce que ça revient à ce qu’on dit dans l’épisode 2 et on ne va pas se répéter. Ici on va prendre le cas d’une femme qui a été violée par son mari, et qui subit de la violence conjugale. Elle veut aller porter plainte, qu’est-ce qu’il se passe, pourquoi ça fonctionne mal ? 

Sabrina : Une femme se présente devant des services de police. On est quand même dans une société patriarcale, c’est donc aussi un mythe de la virilité. Le mythe de la virilité, c’est l’homme fort et dominant. Cela comporte des choses qui ne sont, souvent, pas très bonnes. C’est-à-dire qu’on ne va pas croire les femmes, on va penser qu’elles sont hystériques, on va penser qu’elles en font trop, qu’elles exagèrent, que « ooooh mais c’était pas si grave », « ooooh mais ça fait partie du couple », et en fait, tous ces stéréotypes sont partagés par les forces de l’ordre. Bien qu’on essaie en France de faire passer des lois, des circulaires qui forcent à la formation continue de tous les acteur.ice.s de la lutte contre les violences faites aux femmes, on se rend compte que les stéréotypes restent ancrés et sont très difficiles à prendre en considération par les forces de l’ordre, notamment par les premières personnes que l’on voit : les gardien.ne.s de la paix. C’est quelque chose qu’on commence à améliorer, parce qu’on le prend en considération, on se fait taper sur les doigts par des instances internationales à ce sujet, mais pour autant, c’est toujours présent. Il est donc très compliqué pour une femme, d’aller dans un commissariat de police, de se retrouver face à un.e gardien.ne de la paix, qui est souvent très jeune, qui est souvent rempli de stéréotypes, et qui n’a pas envie de la croire parce que bah voilà, on est hystérique et on exagère quoi. C’est quelque chose de très ancré. Ça c’est la première des choses. Ensuite, je pense que c’est l’ignorance de nos droits : on ne sait pas en fait. 

Hannah : Ça m’est arrivé parce que je ne connaissais pas cette méthode d’agression en fait. La première agression a eu lieu en septembre 2018,  j’avais 16 ans, j’étais en première année de fac. C’était quand je sortais de la fac, je rentrais chez moi. J’ai pris le bus et il y a un gars qui s’est assis à côté de moi alors que le bus était vide. Bon déjà c’est louche, mais on ne va pas lui interdire de s’assoir à côté de moi. Pendant le trajet, il a commencé à faire des mouvements avec son coude, ça frottait ma cuisse, ça m’effleurait, et puis au fur et à mesure que le bus avançait, il se décalait de plus en plus, de manière à me coller sur la vitre, moi je prenais juste un demi siège, et lui il prenait la moitié de mon siège et la moitié de son siège. Il continuait avec son coude à avancer de plus en plus, à le tourner et à approcher de plus en plus jusqu’à me toucher les seins, puis je crois qu’il m’a touché l’entre-jambe mais ça, c’est le black-out total. Je sais que je suis partie, on va dire sous le choc, en état de sidération psychique, je n’ai rien dit, je suis allée m’assoir à une autre place dans le bus, et lui il est parti. Ce qui s’est passé c’est que, un an plus tard, je l’ai revu dans le bus, et il a recommencé exactement le même procédé. Il s’est assis à côté de moi, alors que le bus était vide. Et là, il recommence exactement le même truc, c’est-à-dire bouger son coude de plus en plus sur ma cuisse pour essayer d’aller vers l’entre-jambe et vers les seins. Donc là j’ai crié dans le bus, j’ai fait « TU PEUX BOUGER TA MAIN DE MA CUISSE ? », comme ça. Il s’est levé, il m’a regardée avec les yeux tous ronds et il est parti. Dès que le bus s’est arrêté il est descendu à l’arrêt. 

Là je me suis dit « mais il a fait ça avec un an d’écart, il ne se souvenait pas de ma tête, il a réessayé de faire le même truc, à combien de filles il a dû faire ça ? ». C’est surtout ça qui m’a motivée à porter plainte. Parce que maintenant on va dire que les agressions physiques, les agressions sexuelles j’ai l’habitude mais c’est vraiment l’idée que « je peux protéger des filles en le dénonçant » qui m’a poussée à aller porter plainte. Au début, j’ai juste envoyé un message à la compagnie de bus de ma ville, en donnant l’heure précise, l’arrêt précis, la ligne de bus, le sens… et iels m’ont dit que je devais vite aller porter plainte pour avoir les images parce que ça s’effaçait au bout de 72h. Du coup, le lendemain je suis allée au commissariat juste après les cours, il faut savoir qu’à ce moment-là j’étais mineure, c’était quand j’avais 17 ans, donc ma deuxième année de fac. Je suis arrivée, j’ai expliqué le problème, on m’a mis dans un coin à part parce que j’étais mineure. J’habite seule depuis mes 16 ans, loin de mes parents, donc je portais plainte seule. Je n’ai pas attendu longtemps, contrairement aux autres qui ont porté plainte qui peuvent attendre 3h assis.e, moi j’ai dû attendre… 45 minutes. Quand j’ai expliqué la situation à la dame dans le bureau, ce qui était dérangeant c’est que tout le temps des gens passaient dans le bureau, discutaient avec la dame, s’interrompaient, et iels partaient, la porte était ouverte. Heureusement que moi je n’avais pas honte de raconter ce qui m’était arrivé, mais je pense à quelqu’un qui pourrait avoir du mal avec ce qui lui était arrivé, voir sans cesse des hommes, des femmes, rentrer, discuter de leur journée, « ah t’as vu ce qui s’est passé hier  ? »…, et puis la porte avec tout le monde qui passe devant, bah ça peut être vraiment un frein à parler. Ensuite, on m’a expliqué que vu que j’étais mineure, je ne pouvais pas porter plainte, qu’iels enregistraient quand même pour pouvoir prendre les images du bus. J’ai vraiment donné toutes les infos très précises, comment j’étais habillée aussi, et comment le gars était habillé. Iels m’ont dit que par contre je ne pouvais pas écrire ma plainte, je ne pouvais pas déposer ma plainte, entamer des procédures parce que je n’étais pas avec un.e responsable légal.e. Du coup, je suis partie. Etant donné que mes parents ne sont jamais venu.e.s dans ma ville, je n’ai jamais pu porter plainte avec un.e responsable légal.e. Donc j’ai attendu d’être majeure pour renvoyer un mail parce qu’iels m’avaient donné un papier avec les numéros du commissariat, à qui envoyer un mail, qui appeler si on veut avoir des suites. J’ai envoyé un mail au commissariat, pour demander s’iels avaient eu la saisie d’images, comment ça avançait, et puis comment faire pour entamer les suites de la procédure. Et c’est là que j’ai reçu un mail du commissariat disant qu’iels avaient bien les images, mais qu’en gros - ce qu’iels m’ont dit gentiment mais vraiment le gros sous-entendu c’était - de ne pas venir porter plainte parce que ça ne servirait à rien, que ça leur ferait juste perdre du temps plus qu’autre chose. Dans le message on sentait vraiment qu’iels me dissuadaient de porter plainte. Puis j’ai appris, 7-8mois plus tard (donc il y a quelques semaines), qu’iels n’avaient pas le droit de refuser ma plainte, qu’en étant mineure, c’était quelque chose d’autre que je ne pouvais pas faire, mais qu’iels devaient prendre ma plainte. Moi qui pensais connaitre un peu mes droits, l’article 15-3 du code de procédure pénale, qu’iels ne peuvent pas refuser ma plainte mais ils m’ont mis ce nouveau truc comme quoi les mineur.e.s ne peuvent pas porter plainte, bah j’étais un petit peu sur le cul de voir qu’iels m’ont menti et qu’iels m’ont manipulée. 

Sabrina : On ne sait pas qu’on a le droit à des choses, on ne sait pas qu’on n’est pas obligé.e.s de porter plainte pour par exemple avoir une ordonnance de protection. L’ordonnance de protection, c’est quelque chose qui a été créé en 2010, qui s’est beaucoup améliorée en 2014, et pour autant elle n’est pas du tout massivement utilisée. En réalité, l’ordonnance de protection est un outil fantastique : on n’a pas besoin de porter plainte pour avoir une ordonnance de protection. C’est simple, il suffit de taper « ordonnance de protection » dans Google, et là, s’affiche le Cerfa (le Cerfa c’est le document officiel), avec la notice d’explication, qu’il suffit de renvoyer à l’adresse indiquée, c’est-à-dire le tribunal judiciaire le plus proche de chez soi. C’est hyper facile d’accès, il suffit de remplir un papier chez soi, ou alors sur son lieu de travail parce que des fois c’est difficile chez soi quand on est victime de violence et que l’on est sans cesse scruté.e. On peut le faire avec l’aide d’associations ou d’un.e médecin, voilà c’est hyper facile d’accès. Mais, l’application qui en est faite par les juges aux affaires familiales est assez arbitraire, le texte est aussi assez mal écrit parce qu’il dit qu’on a plus ou moins besoin de prouver les violences. C’est difficile de prouver les violences. 

Léane : Depuis l’enregistrement, un nouveau décret est passé, il demande à la victime de violence conjugale de se saisir d’un.e huissier.e afin de notifier au compagnon l’ordonnance de protection. Ce décret pose problème car il peut freiner la prise de décision. En effet, on demande donc aux femmes de s’affranchir des frais d’huissier.e. Or on sait qu’il y a souvent une dépendance financière de la part des victimes envers leur bourreau, dans les cas de violences conjugales. Ce décret est donc hautement critiqué par la doctrine du droit et on peut émettre l’hypothèse qu’il a été rajouté pour des raisons économiques, car ça coûte cher de délivrer une ordonnance de protection. 

Sabrina : L’ordonnance de protection est quelque chose d’assez fantastique parce que ça empêche juridiquement le conjoint violent, ou la personne violente, d’entrer en contact avec la victime. Donc ça permet aussi de protéger le foyer familial finalement, parce que le conjoint va nécessairement devoir chercher une solution. Malheureusement il ne le fait pas forcément ; ça devient une infraction, donc tu peux facilement finir en comparution immédiate et en prison si tu ne respectes pas cette ordonnance. Le.a juge, c’est ellui qui apprécie la situation, et iel peut donner un bracelet électronique pour vérifier que la personne ne s’approche effectivement pas de la victime. Le fait de devoir démontrer des violences pousse les juges aux affaires familiales à penser que la violence c’est uniquement la violence physique, donc il va falloir prouver qu’on a des traces, c’est quand même un processus assez complexe. Et comme c’est un processus dont on doute énormément parce qu’on n’a pas d’estime de soi, dès lors qu’une personne en face de nous qui représente l’institution, qui représente l’Etat, remet ne serait-ce qu’un tout petit peu en doute ce qu’on est en train de dire - mais juste pour savoir si effectivement on peut faire ça ou pas - et bien on se retrouve complètement désarmé.e et on n’a plus du tout envie de faire quoi que ce soit comme démarche. Donc il faut vraiment que les magistrat.e.s et les autorités soient formé.e.s à accueillir la parole des victimes, et ce, avec des outils psychologiques. On a des armes énormes que sont la psychologie, la psychiatrie, les neurosciences. On ne peut pas mettre tout ça d’un côté et mettre les violences de l’autre. Il faut que tout le monde travaille ensemble pour pouvoir accueillir la parole des victimes.

Témoignage : C’était il y a déjà 6 ans donc j’avais à peine 20 ans, c’était vraiment des choses que je ne pensais pas connaitre dans ma vie. Le contexte, c’est que je suis arrivée tout de suite, juste après l’agression. Donc j’ai tout de suite réagi, je suis venue en état de choc carrément. C’était hyper gênant de venir me plaindre de ce qui venait de m’arriver. Ce qui s’est passé est assez étonnant, j’étais vraiment en larmes au moment où je me déplaçais, mais arrivée là-bas il y a eu comme un mur, et tout s’est verrouillé. Il n’y avait plus aucune émotion de ma part, j’étais juste complètement coupée en fait. Quand je suis arrivée, la première personne que j’ai vue était la dame à l’accueil, qui demande pourquoi vous vous déplacez. La première difficulté pour moi, c’était de dire pourquoi j’étais là, quand j’ai dû nommer le problème, j’ai bégayé parce que je ne savais pas si j’avais le droit d’utiliser ce mot là en fait, agression, viol, j’étais perdue. J’ai senti beaucoup d’empathie de la part de la femme qui m’a reçue, et qui m’a ensuite amenée en salle d’attente, parce qu’il y avait vraiment énormément de gens qui attendaient pour prendre des plaintes. C’est vraiment une fois que j’ai passé les portes du bureau où j’étais accueillie que là, j’ai totalement switché face aux hommes qui m’ont reçue. J’étais incapable de montrer aucune émotion parce que je n’étais pas dans le pathos, j’étais vraiment là pour raconter les faits, et je ne m’attendais absolument pas à ce que je sois reçue de la sorte du coup. Il y a un gros problème avec la prise en charge de la police. Déjà ce qui était désagréable, c’était qu’une fois en face du policier - enfin de la personne qui prenait ma plainte - il y avait constamment des gens qui coupaient la parole, il y avait 4 personnes dans le bureau, des portes qui s’ouvraient, des portes qui se fermaient, c’est limite s’iels se demandaient pas si c’était l’heure du café quoi. J’entendais la plainte d’à côté, je crois qu’il y avait une histoire de téléphone volé, une petite dame qui radotait son histoire à côté… Déjà on est à nu.e de parler de ça, c’est gênant, c’est notre intimité qui a été violée, et en plus il faut qu’on le dise devant des gens qui ne nous connaissent pas et qui nous jugent. 

En gros je suis tombée sur un monsieur qui m’a demandé pourquoi j’étais là, et qui, de but en blanc, a fait des remarques sur ce que je lui rapportais, donc cette histoire d’agression, et s’est permis de dire que ce qui m’étais arrivé en fait, c’était normal, et que des hommes de 60 ans qui draguaient des filles de 20 ans, bah ça arrivait tous les jours, et que je n’avais rien à avancer. Voilà. Donc ça c’était 2h après une agression sexuelle. Une jeune fille de 20 ans ne se déplace pas dans un commissariat pour pleurer et pour se plaindre d’avoir été draguée par un médecin en fait. C’était une deuxième agression dans l’agression. Je pense que j’ai besoin d’en parler parce que ce n’est pas normal, et que je n’aurais pas dû me taire pendant 6 ans. A la suite de ça, il m’a pris une main courante, il m’a dit que de toute façon ça n’irait pas plus loin, qu’il ne pouvait pas retenir ma plainte. Ce qui m’a entre guillemets aidée et sauvée c’est qu’à la suite de la période #MeToo, j’étais tombée sur un article ou sur un compte Insta d’une fille qui justement mettait un lien pour contrecarrer cette action qui n’aurait pas dû se faire, c’est-à-dire qu’iels n’auraient jamais dû refuser ma plainte. C’était une procédure pour porter plainte contre la plainte qui n’a pas été retenue justement. Moi j’étais complètement perdue, je n’y connaissais rien, je n’avais aucun terme, aucun bagage, ni culturel ni social là-dessus, et je me suis faite totalement flouée en fait, parce que je ne connaissais pas mes droits. Du coup, grâce à cette personne, j’ai pu retourner poser ma plainte - chose assez drôle, c’était les mêmes personnes – le mec était au fond à droite, il ne l’a pas ouvert, et là iels étaient beaucoup plus empathiques, mais ce n’est quand même pas allé plus loin, parce que je n’avais pas des preuves tangibles apparemment. Mais la plainte a été retenue, et techniquement le gars a pris aussi un dossier, normalement, parce qu’il n’avait pas le droit de faire ça. J’ai senti que ce n’était pas plus pris en compte que ça. J’ai reçu quand même un avis du tribunal de grande instance, avis de classement victime, « après examen de cette procédure, les poursuites pénales ne seront pas engagées au motif que les faits ou les circonstances des faits de la procédure n’ont pu être clairement établis par l’enquête. En cas d’insuffisance de ressources, vous pouvez demander le bénéfice de l’aide juridictionnelle blablabla » mais genre, tu sais après la deuxième fois que tu viens, enfin ce n’est pas possible, iels nous envoient dans 5 directions différentes juste pour noyer le poisson j’ai l’impression. Si le sujet était plus mis en avant, ça ne se passerait plus. C’est pour ça que c’est important de témoigner. 

Léane : Merci beaucoup pour ton témoignage, nous revenons maintenant à l’ordonnance de protection avec Olympereve. 

Sabrina : Cette ordonnance de protection est fantastique, c’est un outil formidable qu’il faut qu’on utilise, et qu’il faut qu’on utilise correctement. C’est-à-dire pour toutes les formes de violence, pas uniquement intra-familiale, et qu’en tout cas la preuve soit un peu allégée car on peut le faire dès qu’on perçoit des signes de conflit, dès qu’on pense que c’est suffisant pour adopter une ordonnance de protection. Parce qu’on sait très bien que la protection des victimes, c’est essentiel pour éviter les féminicides. C’est essentiel, c’est à la base même d’éviter les féminicides.

Léane : Mais est-ce que tu peux nous parler des délais de délivrance de cette ordonnance de protection ? 

Sabrina : En moyenne, elles sont accordées avec un délai de 37 jours. Un mois et demi. C’est énorme. Parfois plus de 2 mois. C’est énorme, comment on fait pour protéger une victime, que fait-elle pendant ces 37 jours ? On ne parle pas de 3 jours et demi, donc comment on fait ? C’est très compliqué. A côté de ça on peut porter plainte. Alors, moi j’invite particulièrement toutes les femmes qui sont victimes, à appeler des associations d’aide aux victimes, d’aide aux femmes et des avocat.e.s, pour surtout ne jamais aller porter plainte seule. C’est hyper important et si je devais n’avoir qu’un discours jusqu’à la fin de ma vie, ce serait celui-ci : n’allez pas porter plainte seule, soyez accompagnée. A minima d’un.e représentant.e d’une association, et vraiment le top c’est d’un.e avocat.e, et d’un.e avocat.e safe, d’un.e avocat.e qui ait à cœur la protection des femmes. Ce n’est pas le cas de toust.e.s les avocat.e.s. Il faut quand même préciser que le droit, c’est un milieu dans lequel le sexisme sévit aussi, il faut faire attention à l’avocat.e qu’on va voir. Là, du coup, je vais faire un saut énorme, c’est-à-dire que je vais parler de l’aide juridictionnelle. L’aide juridictionnelle, c’est essentiel pour protéger les femmes, parce que c’est ce qui va apporter des moyens financiers aux femmes qui n’ont pas les moyens de se payer un.e avocat.e. Et comme on sait pertinemment que pour protéger une femme le plus efficacement possible, il lui faut quelqu’un.e à ses côtés qui connaisse ses droits, donc un.e avocat.e, on a besoin de cette aide juridictionnelle. Sauf que les barèmes qui permettent d’avoir l’aide juridictionnelle sont extrêmement bas ! Finalement, ce dont on se rend compte, c’est que les gouvernements, les uns derrière les autres, parce qu’il n’y en a pas eu un pour rattraper l’autre, créent des choses qui sont fantastiques, comme l’ordonnance de protection, comme l’aide juridictionnelle, mais vides de tout moyen. Comment fait-on sans argent ? Comment on fait pour former tous les acteurices de la lutte ? Il faut de l’argent pour ça, il faut que des gens se déplacent, il faut que des gens enseignent, l’enseignement ce n’est pas gratuit ! On a beau être militant.e, on ne peut pas non plus tout le temps passer notre temps à donner des cours gratuitement pour lutter contre des violences qui sont un fait systémique, et donc collectif, et donc l’Etat en est responsable ! Nous ne pouvons pas, nous, prendre à charge en tant que militant.e.s toutes les responsabilités, ce n’est pas possible. Et je pense que l’Etat se repose un peu trop là-dessus, bien qu’en même temps, il arrête de subventionner les associations, met un terme aux contrats Aider, alors que les associations reposent sur ces contrats, comment on fait au juste ? Moi il faut que je comprenne la cohérence de chaque gouvernement. Alors iels sont là à créer des numéros de téléphone. Mais vous vous foutez de la gueule de qui en fait ? Ça sert à quoi un numéro de téléphone ? Un numéro de téléphone où après 22h, on ne peut pas appeler ? Mais vous savez à quelle heure les violences arrivent ? Alors il n’y a pas d’heure, mais quand on sait que les violences conjugales sont souvent corrélées à la consommation d’alcool, je vous le donne dans le mile, on est saoul après 22h hein. 

Léane : Mais oui, quand iels sont pas carrément à côté de la plaque en fait. Je pense par exemple, pendant le confinement, au lieu de rallonger la plage horaire des victimes, qui est assez restreinte comme tu viens de le dire, iels ont fait une ligne d’écoute pour les auteurs de violence. Mais quand on étudie les cycles de la violence, on se rend bien compte que de façon générale, l’agresseur ne sait pas qu’il est violent. Il est dans le déni de ses actes, donc il ne va sûrement pas appeler pour parler de ça avec un inconnu. A savoir, surtout, que la plage horaire pour les agresseurs était plus large que celle pour les victimes. On se marche un petit peu sur la tête… 

Sabrina : Donc, c’est hyper hypocrite tout ça. C’est hyper hypocrite parce qu’on est face à des gouvernements successifs qui disent « mais regardez, on prend des décisions, regardez, on a créé l’ordonnance de protection, regardez, on a l’aide juridictionnelle, vous ne pouvez pas dire que ça n’existe pas, on fait des choses ». Ok, cool, mais l’application de tout ça, elle est où en fait ? On a un budget consacré à la justice par habitant.e qui est l’un des plus faible d’Europe. Alors quand on est censé être la 5ème ou la 6ème puissance mondiale, ça fait un peu peur. Mais là où c’est encore plus intéressant et plus révoltant, c’est qu’on constate que ce budget de la justice, est à un tier consacré au système carcéral. Evidemment qu’on a besoin de mettre de l’argent dans les prisons, mais je trouve ça hallucinant aujourd’hui que l’argent de la justice parte dans des institutions privées, comme Bouygues qui a construit des prisons, c’est là-dedans que l’argent de la justice va, enfin ce n’est pas possible. Effectivement , il n’y a pas d’argent magique, c’est vrai, je pense que Macron n'avait pas tort là-dessus, mais en même temps c’est marrant, il y a vachement d’argent magique pour les entreprises tout d’un coup quoi. 

Léane : Mais voilà, c’est au final, quelles sont tes priorités. 

Sabrina : Et si la priorité aujourd’hui elle n’est pas l’égalité homme-femme, la fin des discriminations, et la lutte contre les violences qui sont faites aux femmes, et bien en fait ça coûte, comme dirait Macron, un pognon de dingue. Dans l’Union Européenne, on a estimé le coût du manque d’égalité entre hommes et femmes à 222 milliards d’euros par an. 222 MILLIARDS PAR AN. Il n’y a rien qui vous choque là-dedans ? Parce que en réalité les violences faites aux femmes, ça coûte un pognon dingue, parce que c’est un manque d’accès à l’éducation, donc aux professions qui sont les mieux rémunérées et plus productives, c’est de l’absentéisme dans l’entreprise, c’est un coût pour le système de santé, un coût pour le système judiciaire, pour ce qui concerne la police et la justice. Si on enrayait les violences faites aux femmes à la base, on économiserait tellement d’argent, et cet argent économisé, on le ré-injecte pour continuer à éduquer, il ne faut pas être sorti de l’ENA pour comprendre tout ça. 

Léane : Concernant les viols en France, on estime à 1% le nombre de violeurs condamnés par la justice. Les viols condamnés sont souvent les cas de figure les plus ancrés dans l’imaginaire collectif, à savoir, celui commis par un étranger tard le soir dans la rue. Cas de figure, qui est, je rappelle, extrêmement rare, parce que dans 86% des cas, la victime connait son agresseur. Sabrina, comment cette impunité s’explique-t-elle ? 

Sabrina : Alors, il y a une bonne raison à ça, et je sais que c’est quelque chose de très difficile à entendre, je vous avoue que personnellement, en tant que juriste, parfois j’ai des cas de conscience où je me dis « mais être juriste c’est assez peu compatible avec être féministe », et c’est délicat d’accepter ça, ça doit être délicat pour vous de l’entendre, mais tout simplement parce que le procès pénal en France, et assez généralement, repose sur la preuve. C’est une excellente chose. C’est une excellente chose que le procès pénal repose sur la preuve parce qu’on ne peut pas accuser quelqu’un.e, on ne peut pas mettre quelqu’un.e en prison, on ne peut pas condamner quelqu’un.e si on n’a pas de preuve. Et je pense que si on en parle dans un autre contexte que les violences faites aux femmes, on est tous.tes d’accord là-dessus en réalité. On est tous.tes d’accord sur le fait que ça nécessite des preuves. Mais les preuves, dans le cas des violences sexuelles, sont excessivement compliquées à rapporter. Très compliquées à rapporter.

Hannah : La technique du sac de pommes, je ne sais pas si tu la connais. En gros, iels doivent donner le plus gros chiffre possible, le nombre d’enquêtes résolues sur le nombre d’enquêtes ouvertes. Là c’est une métaphore mais, en gros, on va dire que le sac de pommes est volé, donc ça fait une enquête ouverte. Quand on va retrouver le sac de pommes, au lieu de faire « l’enquête est résolue, on a retrouvé le sac de pommes », iels vont faire « une pomme a été volée, une pomme a été retrouvée, une pomme a été volée, une pomme a été retrouvée, une pomme a été volée, une pomme a été retrouvée », et ça grossit les chiffres énormément, donc c’est un monde de corrompus. Pour cellui qui aura le plus de sacs, pour cellui qui mettra le plus d’amendes, c’est pour ça qu’iels se concentrent vraiment sur les petits dealers, ou les sans-papiers. Parce que ça, quand iels le voient, c’est une enquête ouverte et une enquête résolue, alors qu’avec un viol ou un truc comme ça, c’est difficile à prouver. 

Sabrina : Comment on prouve qu’on a été violée par son conjoint en plein milieu de la nuit alors qu’on dormait ? C’est vraiment très délicat. Moi j’ai tendance à dire aux victimes qu’il faut engager une conversation par messages, par le biais d’une messagerie sur son téléphone ou sur son ordinateur, et essayer d’amener l’auteur de ces violences à avouer ce qu’il a fait. Ça nécessite un peu de manipulation, ça nécessite du coup de mettre ses émotions de côté, et c’est extrêmement difficile. C’est extrêmement difficile. Souvent, en plus, on a un biais cognitif assez énorme : si tu as été violée par ton conjoint, pourquoi tu ne l’as pas quitté ? C’est aussi simple que ça. Très récemment j’ai lu dans un document qui est actuellement en ligne sur un site d’éditeurices de manuels en droit entre autres et d’actualité, que c’est assez incompréhensible le viol conjugal car si on n’a pas envie d’avoir des relations sexuelles dans le mariage, on n’a qu’à pas se marier. Ouais, et ça c’est dans un document officiel écrit par une professeure de droit, très connue. Ce n’est pas écrit comme ça, mais c’est ce que ça veut dire en réalité. C’est choquant. En droit pénal, toutes les preuves se valent, ça veut dire que si vous amenez l’auteur de ces violences à admettre par message ces violences, alors sans prononcer le mot viol hein, parce que c’est possible quand même sans prononcer le mot viol, c’est considéré comme recevable. Si vous en avez parlé autour de vous, les jours qui ont suivi, à vos ami.e.s, à votre famille, à votre médecin, c’est une preuve recevable. Alors attention, ce n’est pas la seule preuve, il faudra tout un faisceau d’indices qui soient concordants et qui laissent penser qu’effectivement, il a bien commis cette violence. Je sais que c’est difficile, mais appelez peut-être les exs de cette personne, pour essayer de voir si elles aussi ont été victimes, c’est un indice supplémentaire que son comportement est ce qu’il est. Les cas de viols intra-familiaux ont lieu sur des victimes qui sont assez jeunes, du coup c’est difficile de récolter des preuves, ou en tout cas de comprendre ce qu’il s’est passé dans le cas de ces violences-là, c’est pour ça qu’elles n'aboutissent pas les plaintes. Tout simplement parce qu’on n’a pas de preuve. Encore une fois, le problème de moyens. Ça ne doit pas reposer sur les militantes, que d’éduquer le monde. Je passe un temps monstrueux à faire un post Instagram. En fait on en est là, à devoir aller sur Instagram pour comprendre ce que c’est l’égalité homme-femme, il y a un problème, parce que, moi franchement tout ce dont je me souviens de l’éducation nationale, c’est Charlemagne et Clovis ! C’est super important l’histoire hein, les historien.ne.s merci beaucoup, j’adore ça l’histoire en plus. Mais bon, à un moment donné, la couleur des cheveux de Clovis, on n’en a rien à foutre non, on pourrait peut-être parler du genre, des idées comme ça ? Non mais c’est vrai, moi je me souviens à la fac de droit, en première année, on nous parlait des cheveux des rois, parce que la force reposait dans le cheveu. Alors c’est intéressant, c’est un fun fact que j’adore, je trouve ça hyper intéressant, mais venez on parle de la fin des discriminations et de toutes les discriminations ! On parle de choses concrètes, parce qu’on ne peut pas demander aux jeunes qui arrivent dans la sexualité de comprendre ce que c’est l’empathie et la bienveillance, si à aucun moment on leur a appris, tout ce qu’on leur apprend c’est que Napoléon a niqué tout le monde, super.

Léane : Oui et puis je rappelle quand même que c’est Netflix, qui là s’est enfin chargé d’éduquer les enfants / adolescent.e.s sur l’éducation sexuelle, c’est Netflix ! C’est fou quand même. Ça fera l’objet du prochain épisode, tout ce qui est lié à la sexualité, donc on ne développe pas, mais c’est quand même hallucinant !

Sabrina : Mais c’est incroyable. Et qui envoie des manuels ! C’est fou ! 

Léane : Moi ce qui me dépasse en plus c’est que dans le monde capitaliste dans lequel on vit, on s’assoit sur des milliards d’euros, on perd littéralement de l’argent ! Ça n’a aucun sens…

Sabrina : Mais oui, mais oui ! Toutes les inégalités coûtent excessivement cher à la société ! En fait ça rapporterait énormément d’argent, de vraiment assurer l’égalité partout pour tout le monde. Aujourd’hui, on a tendance à penser que c’est le droit, c’est la loi, qui va pouvoir gérer tout ça. C’est-à-dire que c’est le droit qui va punir, c’est la loi qui va permettre de réguler les relations homme-femme. Mais non, en fait, le droit aujourd’hui, tel qu’il est, à part pour la définition du viol, et quelques éléments de la légitime défense et encore, le droit à l’état actuel est assez bien fait, il est très neutre, le code pénal en tout cas est très neutre. On peut penser quand même qu’il y a quelque chose à faire au niveau des acteurices du droit, c’est-à-dire celleux qui l’utilisent, celleux qui le pratiquent, là effectivement il y a à faire. Cette chose à faire, c’est l’éducation. On pense que c’est au droit de régler tout ça, c’est au droit de régler les violences, c’est au droit d’intervenir en permanence, donc on a une inflation législative qui ne sert plus à rien, et contreproductive parce qu’on ne comprend même plus de quoi il s’agit, alors même que le droit, ça sert en dernier recours. Ce dont on a besoin, c’est de l’éducation ! On a besoin d’éducation, on a besoin de psychologie. Donc qu’on donne les moyens à la médecine, à la psychiatrie, qu’on ouvre de nouveaux hôpitaux psychiatriques, parce qu’on n’arrête pas d’en fermer au profit des prisons, ce qui est complètement ahurissant. Qu’on s’intéresse à des études un peu plus comparées, c’est-à-dire entre les pays, entre les états pour voir ce qui se fait ailleurs, ce qui fonctionne, et comment on peut l’adapter chez nous par rapport à notre culture, et enfin qu’on rende essentielle la cause féministe dans l’éducation ! La cause féministe, c’est avant toute chose, le truc le plus simple du monde, c’est l’égalité en droit, des hommes et des femmes, et j’ai envie d’ajouter, et de tous les genres. Et ce serait bien qu’on l’ajoute dans la loi mais ça c’est un autre débat. Je vais conclure encore une fois avec le discours que j’aurai jusqu’à la fin de ma vie : si vous êtes victime de violence, s’il vous plait, faites appel à un.e avocat.e. 

Léane : Merci Sabrina, alias Olympereve, d’être venue aujourd’hui dans Mécréantes, merci également aux femmes qui sont venues témoigner, dont Endolorix que vous pouvez retrouver sur les réseaux sociaux. Merci à Belair pour l’introduction musicale, et merci à vous pour l’écoute. J’espère que cet épisode vous aura plu, si c’est le cas, n’hésitez pas à mettre 5 étoiles sur Apple Podcast. Mécréantes est également présente sur Instagram où je publie régulièrement du contenu complémentaire. Pour finir, nous refermons ce chapitre relié aux violences faites aux femmes pour aller vers des sujets plus légers mais non moins sans analyses. Merci encore, et à très vite.